SÉMINAIRE

Architecture : une hantologie
Revenants

Norbert Godon et Konrad Loder, artistes

Jeudi 4 mai 2023 à 14h – Atelier 404

« Revenants »

Invités : Norbert Godon, artiste, commissaire d’exposition / Konrad Loder, artiste / Enseignant Haute école des arts du Rhin (HEAR)

« L’hantologie, du point de vue de Derrida, consiste plutôt à laisser le mort exister dans son altérité radicale, sans chercher à l’intérioriser dans un beau souvenir. Il s’agit plutôt d’apprendre à vivre avec l’échec du deuil, avec ce que la mort d’un être irremplaçable inaugure comme champ d’expérience inédit, par exemple la possibilité qu’il revienne sans cesse, et hante le présent où nous vivons ».

Si un revenant n’est pas rattaché à un temps ou une durée précise (il peut être parti hier comme il y a un siècle), il doit cependant, pour être nommé comme tel, être rattaché à un lieu. Il faut être parti de quelque part pour y revenir. Les revenants ne sont pas des apparitions mais les témoins d’une disparition. Des témoins aptes à raconter, à faire histoire, à rendre compte des conditions de leur disparition et des péripéties qui s’en sont suivies.
La question peut alors se poser de savoir si c’est le lieu qui définit le revenant ou si c’est le revenant qui définit le lieu supposant ainsi qu’un lieu ne peut être lieu que dans la possibilité d’y revenir. Une pensée de l’architecture est-elle, dans ces conditions, une pensée de la revenance ?

Ainsi, dans le film Dead Man de Jim Jarmusch, Nobody, un indien rejeté par sa communauté, est persuadé que Bill Blake, jeune comptable, n’est autre que William Blake, le poète anglais. L’amitié naît de la confusion, d’un jeu de mot ou d’un glissement de sens. Toujours est-il que c’est ce qui fait exister dans l’imaginaire des spectateurs que nous sommes, par le biais des citations, un troisième personnage, absent, le vrai William Blake.
Dans le but de fuir le monde civilisé, Nobody, figure odysséenne, accompagne avec une extrême bienveillance celui qu’il pense être le poète qu’il aime tant et dont il connaît les vers par cœur.
Bill Blake – alias William Blake – voyage par conséquent avec Personne (traduction de Nobody). L’absent – ou la figure de l’absent – est accompagné de personne dans ce jeu de tiroirs temporels où s’entrecroisent les fantômes de Blake, Dante et Ulysse.

« On n’arrête pas les nuages en construisant un bateau ». Ces mots exprimés Nobody nous renvoient alors aux conditions d’apparition des formes, en la possibilité que quelque chose, dans les vagues revenantes du temps, puisse exister, ou pas.

Architecture : une hantologie est un projet de recherche-création, articulant expositions, séminaires et publications porté par Pierre-Albert Perrillat (Professeur, Théories et Pratiques de la Conception Architecturale et Urbaine, TPCAU), Rémy Jacquier et Patrick Condouret (Maîtres de conférences, Arts et Techniques de la Représentation – Arts Plastiques et Visuels, ATR-APV).

Cinq séminaires sont proposés, auxquels sont invités aussi bien des artistes, des architectes récemment diplômés que des enseignants de diverses disciplines de l’UJM, l’ENSASE et l’ESADSE, ils sont organisés avec l’unité de recherche ECLLA ” Etudes du Contemporain en Littératures, Langues, Arts ” Université Jean Monnet et feront l’objet d’une publication ultérieure en partenariat avec Créaphis Editions.